Au-delà de la fenêtre deux enfants se courent après en criant. Les gens sont bien couverts, il doit faire froid malgré le soleil. Plus de brocanteurs que de visiteurs, c’est sans doute que les livres sont moins vendeurs que les babioles sorties d’un grenier. Tant de culture, ça doit faire peur. Allez, je me lance, je passe de l’autre côté du miroir. Au temps pour moi, je parlais de culture, je vois le dernier Marc Levy. Ma théorie tombe à l’eau. Drôle de cohabitation sur le même stand, « Configures, gelées et marmelades » côtoie pacifiquement, en apparence, une œuvre de Philippe Bouvard et des livres élimés datant de 1524. Je suis presque gênée pour eux, il me prend des envies de les réorganiser par thème, par ordre alphabétique. Non, il ne vaut mieux pas, déjà que les exposantes nous regardent bizarrement, avec nos petits carnets. « Vous faites un reportage ? ». « Non ». « Vous travaillez aux archives ? » « Non, non ». Je m’amuse à entretenir le mystère. Tout d’un coup, un cri. Un des enfants, sur son tricycle, a failli décaniller une pile de livres. Heureusement, le roman de Michel Drucker est sain et sauf. La culture en aurait pris un coup. Le petit peut recommencer à arpenter la cour et sa maman retourner à ses ventes. Ici, on se plaint du manque de publicité, là on se raconte ses autres vide-greniers désastreux… Au moins, on a le soleil, des cartons entiers du Journal de Mickey et l’Anatomie humaine en 5 volumes pour passer le temps.
Moi, je retourne à mes carnets et j’empoigne mon stylo. Qui sait, peut-être qu’un jour, une de mes œuvres figurera en bonne place entre un Harlequin et une BD de Spirou, voire, avec un peu de chance, un manuel des années 50 sur « La bonne éducation des enfants ».
Il faudra publier sur papiers, si tu veux que tes nouvelles se retrouvent en brocante