C’est le printemps !

Cette période de confinement est peut-être l’occasion pour certains d’écrire. Ce n’est pas vraiment mon cas, d’abord parce que, comme beaucoup, je jongle entre le travail et l’école à la maison de deux enfants, et puis parce que je ne peux écrire qu’en groupe, ou seule, mais à la terrasse du café, au milieu de l’effervescence. Et ces deux situations sont actuellement impossibles… Heureusement, il a le jogging d’écriture proposé depuis le début de l’année à mon fils de CM1 par sa maîtresse. Il continue pendant cette période étrange, et il nous offre une parenthèse de créativité en famille dont je suis très reconnaissante. Donc chaque fois que je le peux, je m’arrête de travailler pour écrire au côté de mon « grand » en suivant les mêmes règles (15 minutes d’écriture) et la même consigne que lui… Voici le premier de ces textes. La consigne était « C’est le printemps »…

La présentatrice météo l’a annoncé hier au 20h de TF1. C’est le printemps ! Les jours rallongent, les températures s’adoucissent, les oiseaux pépient, les bourgeons se forment. C’est le printemps et ça me fait une belle jambe. Je suis coincé dans cette cellule de 10 m² avec une minuscule fenêtre à barreaux. Je vois s’il fait jour ou nuit, s’il pleut ou s’il neige, et je devine à une minuscule variation de la luminosité si le soleil perce ou pas à travers les nuages. La fenêtre ne s’ouvre pas, bien sûr. Alors, qu’il fasse chaud ou froid ne change rien pour moi, ici il fait toujours un peu froid de toute façon. On n’a jamais tout à fait chaud quand on est seul. Si je tends l’oreille, je peux parfois entendre les oiseaux, surtout tôt le matin, quand les marteaux piqueurs et les camions sont encore à l’arrêt. Les gardes nous réveillent tous les jours à 6 heures, comme si nous avions un emploi du temps chargé à respecter, autre que de fixer les taches au plafond, de manger la bouille infâme qu’ils nous glissent trois fois par jour par l’ouverture de la porte conçue à cet effet, et à faire quelques exercices pour se préparer à une hypothétique sortie, dans un futur que nous n’osons imaginer de peur de trop y croire. Pour l’instant, je ne vois les bourgeons qu’en fermant très fort les yeux pour retrouver des bribes de souvenirs de plus en plus flous. Des souvenirs du temps d’avant où je ne savais pas ma chance de pouvoir profiter de la chaleur du soleil, des cris des oiseaux et des grains de pollen qui me faisaient éternuer. Du temps où le printemps n’était pas qu’une annonce dérisoire d’une présentatrice météo.

2 réponses sur “C’est le printemps !”

  1. bravo!
    voici mon modeste essai ‘(mais j’ai mis beaucoup plus de 15 minutes!)

    C’est le printemps

    Malika ouvre la fenêtre ; elle regarde en bas l’étendue de béton recouverte de voitures. Un peu en retrait, les tilleuls viennent de mettre leurs feuilles d’un vert tendre .Á leurs pieds, la pelouse, d’ordinaire si triste, est couverte de fleurs jaunes, de pissenlits pense- elle, bien que, du huitième étage, il lui soit difficile de les reconnaître. Elle lève les yeux vers l’horizon, s’étonne de le voir si étendu au dessous d’un ciel si clair. Au-delà des tours, les rumeurs de la ville lui parviennent comme assourdies, semblables à celles d’un dimanche, jour de grasse matinée. Nous sommes pourtant lundi mais elle préfère profiter encore un peu du calme gentiment troublé par les piailleries des merles moqueurs, elle se fait un café, prépare le petit déjeuner, retarde le moment d’aller réveiller ses enfants, tant la journée promet d’être longue.
    Il lui faudra les aider à faire les devoirs transmis par la maîtresse puis les descendre pour une courte promenade autour de l’immeuble ; une fois de plus ils lui demanderont pourquoi ils ne peuvent pas aller jusqu’au Square Youri Gagarine pour escalader l’araignée, tournicoter sur le tourniquet et se balancer sur la balançoire.
    Et puis, ils rentreront, elle préparera des gnocchis, leur plat préféré, inventera des jeux, calmera leurs disputes, fera le clown pour sécher les larmes, s’extasiera devant leur dessins, Après le bain, à court d’idées, elle les mettra devant la télé jusqu’à l’heure du dîner .Elle repoussera l’heure d’aller les coucher, en regrettant un peu que la nuit vienne de plus en plus tard. Elle leur lira une histoire qui se termine bien puis, se retrouvera seule, penchée à la fenêtre goûtant à la douceur du soir.
    Elle se souviendra longtemps de ce printemps bizarre où elle se languissait de l’automne

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