L’objet du délit

Pour ce texte, nous étions invitées à amener un objet du quotidien, puis à imaginer comment nous l’avions obtenu (achat, vol, cadeau, etc). Je vous laisse découvrir de quoi il s’agissait en ce qui me concerne…

Ça faisait tellement longtemps que j’en avais envie. Je passais tous les jours devant la boutique en allant travailler et je les regardais, exposées comme dans la vitrine d’un grand bijoutier. La rondeur de leurs formes, le brillant de l’aluminium, autant de promesses qui m’attiraient irrésistiblement. Le gérant les avait disposées dans un camaïeu de couleurs tout en courbes qui rappelait un long serpent, avec, au bout de sa queue, une merveille dorée dont je ne pouvais détacher le regard. Jour après jour, je passais, en mémorisais chaque détail, chaque contour, à tel point que j’avais l’impression de la toucher. Calligraphié tout autour de ce joyau, un mot, plein de promesses d’exotisme et de voyages : Nicaragua. Il me la fallait. Alors, un jour j’entrai dans la boutique en repérage et je fis mine de m’intéresser aux machines, tout en notant les habitudes du personnel, les emplacements des caméras de surveillance, l’accès à la vitrine. Je partis en essayant de garder un pas mesuré, avec la sensation que les battements de mon cœur suffisaient à m’incriminer. Je n’avais encore rien fait, mais j’étais déjà coupable. Le lendemain je revins après une nuit passée à rêver d’oiseaux colorés et d’immenses plantations gorgées de soleil. La boutique était animée, j’avais choisi l’horaire de pointe. Les trois salariés était occupés avec des clients, je me trouvais dans l’angle mort de la caméra, je portais une tenue sombre mais neutre et un chapeau aux rebords suffisamment larges pour masquer une partie de mon visage. Je ressemblais à une touriste américaine en pleine séance de shopping à Paris. J’avais même en main un sac Galeries Lafayette retrouvé au fond d’un placard. Je n’avais pas commis l’erreur de porter un appareil photo autour du cou : de nos jours les touristes les ont remplacés par des perches à selfie : j’aurais pu me faire repérer. J’étais prête et je n’avais pas peur. Je la saisis d’un coup, la fourrai rapidement dans mon sac, puis fit un tour en m’attardant devant les émulsionneurs pour brouiller les pistes. Puis je lançai un sonore « Bonne journée ! » et sortis du magasin. Personne ne m’avait prêté la moindre attention. Je rentrai tout de suite chez moi et posai mon trésor sur le plan de travail nu de la cuisine. Elle était parfaite et elle était à moi. Mais maintenant que j’avais sauté le pas, que j’étais passée d’innocente passante à voleuse avec tant de facilité, je n’avais qu’une image en tête : l’œil du serpent, cette splendeur rose fuchsia, au doux nom de « Kenya ». Cette nuit-là, je rêvai de lions pourchassant des gazelles et d’immenses plantations gorgées par le soleil…


9 réponses sur “L’objet du délit”

  1. Je relis toujours une seconde fois avant mon commentaire, là c’était pour essayer de deviner ce que le personnage avait subtilisé, car j’aime à croire que c’est une histoire et que tu n’es pour rien dans la disparition de cette pierre (-:)
    Si j’ai bien compris une bague !

  2. Les capsules j’ai trouvé au bout de 3 erreurs et 5/ 6 lectures cerveau concentré
    Un bon moyen de m’obliger à lire avec grande attention
    Merci ma puce

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